La France reconnaît le problème posé par la Directive sur la responsabilité des produits défectueux pour les victimes de médicaments

Six ans après ses premières actions auprès des autorités de santé et des gouvernements successifs pour faire évoluer l’indemnisation des victimes d’accidents médicamenteux, AMALYSTE et les associations de victimes de médicaments voient enfin un premier signal fort des autorités françaises sur le sujet.

Suite à la consultation européenne sur l’évaluation de la directive sur la responsabilité des produits défectueux, à laquelle AMALYSTE avait contribué au nom des victimes de médicaments françaises, les autorités françaises ont été amenées à prendre position et à (enfin) signaler les difficultés d’« Adéquation et efficacité de la directive s’agissant des produits de santé » : « Il ressort des divergences de jurisprudences internes auxquelles l’arrêt précité du 21 juin 2017 ne met pas un terme définitif et des différences de régimes juridiques qui subsistent entre Etats membres sur la responsabilité des exploitants de produits de santé (pour mémoire, l’existence en Allemagne, d’un régime de responsabilité pour risque antérieur à la Directive 85/374/CEE) que la question de l’élaboration d’une directive spécifique à la responsabilité pour les produits de santé se pose. En effet, depuis les années 2000, la France a été amené à mettre en place des dispositifs publics d’indemnisation des victimes de produits de santé afin de pallier les obstacles que celles-ci rencontrent pour faire valoir leurs droits notamment à l’égard des industriels, qui se réfugient derrière le régime très favorable de la directive de 1985. »

Ainsi donc, les autorités françaises reconnaissent auprès de la Commission Européenne que la question d’un régime de responsabilité spécifique pour les produits de santé est pertinente et que les industriels bénéficient, avec la directive actuelle sur la responsabilité des produits défectueux, d’un régime extrêmement favorable.

Voir la note complète des autorités françaises

AMALYSTE contribue à la consultation européenne sur l’évaluation de la directive sur la responsabilité des produits défectueux

La directive sur la responsabilité des produits défectueux est un des freins à l’indemnisation des victimes de médicaments identifiés par AMALYSTE depuis de nombreuses années.

C’était donc une évidence pour nous de réponse à la consultation menée par la Commission européenne sur l’évaluation de cette directive et qui se clôturait le 26 avril dernier.

AMALYSTE a contribué, au nom d’un collectif d’associations de victimes* à la consultation menée par la Commission Européenne sur l’évaluation de la Directive sur la responsabilité liée aux produits défectueux. De plus, AMALYSTE a été également auditionné en direct le 2 mai dernier par la société VVA qui conduit, dans un consortium avec EY et Technopolis Group, l’évaluation de la Directive 85/374/EEC sur la responsabilité liée aux produits défectueux, sous le mandat de la Commission Européenne.

Pour rappel, les freins à l’indemnisation des victimes de médicaments posés par cette directive sont énormes :

– Elle fixe des conditions d’accès à l’indemnisation quasiment inatteignables pour les victimes de médicaments. En effet, il suffit à l’industriel de signaler un effet indésirable dans la notice de son médicament pour être exonéré de toute responsabilité si cet événement indésirable survient. De plus les délais de prescription sont beaucoup trop courts face à la gravité et à la complexité des dommages subis par les victimes : 3 ans après la survenue du dommage et 10 ans après la commercialisation du médicament. Ce dernier point protège indûment les industriels de toute responsabilité vis-à-vis d’effets indésirables à long terme (ex : distilbène)

– la directive remplace tous les régimes de responsabilité sans faute préexistants, voire même remplace les régimes de responsabilité pour faute dans de nombreux cas : elle est donc devenue quasiment incontournable.

Les victimes de médicaments dans leur ensemble demandent à ce que les produits de santé soient sortis du champs d’application de la directive sur la responsabilité liée aux produits défectueux.

La contribution d’AMALYSTE au nom des associations françaises de victimes de médicaments.

Les documents joints par AMALYSTE à la consultation sont accessibles ici :

Etat des lieux de l’indemnisation des victimes de médicaments en France (2015)

Plaidoyer pour les gueules cassées du médicament, Bloch L, Le Pallec S.,

– Pilule d’Or Prescrire 2014 sur l’indemnisation des victimes de médicaments

TADS who should pay

* Le collectif comprends les 10 associations suivantes : AMALYSTE (Stevens-Johnson/Lyell), APESAC (Dépakine), AVEP (pilule de troisième génération), CADUS (tout médicament), le CLAIM, comprenant notamment AIVQ, AVRG, E3M et le REVAHB, Les filles D.E.S (Distilbène), Réseau D.E.S France (Distilbène).

Droit des victimes de médicaments : revoir les vidéos du Colloque à l’Assemblée nationale

Les vidéos du Colloque, ainsi que les présentations, sont désormais accessibles à ce lien.

La présentation de l’association AMALYSTE et des syndromes de Lyell est également accessible à ce lien

Lien par intervention :

Gérard Bapt, député, et Stéphanie Chevallier, association Les Filles DES – Allocutions d’ouverture du colloque « Faut-il repenser le droit des victimes d’effets indésirables de médicaments ? »
VIDÉO des interventions…

Sophie Le Pallec, association Amalyste (syndromes de Lyell) « Témoignage de victimes d’effets indésirables graves de médicaments : d’épreuves en épreuves »
VIDÉO + texte de l’intervention…

Emmanuelle Brun, association Réseau DES France « Témoignage de victimes d’effets indésirables graves de médicaments : d’épreuves en épreuves »
VIDÉO + texte de l’intervention...

Marine Martin, association APESAC (aide aux parents d’enfants victimes d’embryo-foetopathie au valproate) « Témoignage de victimes d’effets indésirables graves de médicaments : d’épreuves en épreuves »
VIDÉO + texte de l’intervention…

Sophie Le Pallec « Un droit très défavorable aux victimes : éléments-clés du cadre juridique en Europe »
VIDÉO + texte de l’intervention…

Antoine Béguin « La voie amiable : trop souvent une impasse »
VIDÉO + texte de l’intervention…

Martine Verdier « La voie contentieuse : longue, coûteuse et éprouvante »
VIDÉO + texte de l’intervention…

Marianick Lambert et Karim Felissi « Les actions de groupe en santé : rendre la voie contentieuse plus accessible aux victimes »
VIDÉO des interventions…

Laurent Bloch « Créer un fonds d’indemnisation « produits de santé » spécifique »
VIDÉO + texte de l’intervention…

Irène Frachon – Allocution de clôture du colloque « Faut-il repenser le droit des victimes d’effets indésirables de médicaments ? »
VIDÉO de l’intervention…

Indemnisation des victimes de médicaments : état des lieux et recommandations (rapport)

A l’issu du Colloque à l’Assemblée Nationale, les associations de victimes de médicaments ont rendu publique le rapport sur l’indemnisation des victimes de médicaments, qui dresse un état des lieux (peu reluisant) et émet des recommandations pour améliorer la situation des victimes.

Résumé

  • En Europe, les victimes d’effets indésirables graves de médicaments qui souhaitent obtenir réparation des préjudices subis sont confrontées à un parcours d’épreuves plus insurmontables les unes que les autres.
  • Afin d’obtenir réparation, les victimes doivent :
    • agir avant que leur action ne soit plus recevable ;
    • démontrer le lien de causalité entre une prise de médicament et la survenue de l’effet indésirable à l’origine du dommage (alias imputabilité) ;
    • rechercher une responsabilité.
  • Depuis l’application d’une directive européenne de 1985 relative aux produits défectueux (transposée en France en 1998), les firmes pharmaceutiques n’ont plus d’obligation de sécurité de résultat vis-à-vis des patients. En l’absence de faute ou quand le produit est considéré comme non défectueux (l’effet indésirable figurait dans la notice), ce qui représente la grande majorité des cas, les firmes ne sont pas considérées comme responsables.
  • En pratique, dans les États membres de l’Union européenne qui ont mis en place une procédure de règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, dont la France fait partie, deux voies d’action sont possibles pour les victimes :
    • Si la responsabilité d’une firme ou d’un professionnel de santé est engagée, la victime pourra engager soit une procédure contentieuse devant les tribunaux, celle-ci étant souvent longue, coûteuse et éprouvante ; soit une procédure « amiable » devant le mécanisme d’indemnisation national ;
    • En l’absence de responsabilité pour faute ou lorsque la responsabilité d’un producteur d’un produit de santé à l’origine d’un dommage ne peut pas être engagée (produit non défectueux, exonération par le risque de développement, prescription de l’action), alors la victime pourra se tourner vers le mécanisme d’indemnisation national et la solidarité nationale, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) peut être amenée à indemniser la victime en France.
  • Le système français d’indemnisation amiable par l’ONIAM, mis en place par la loi Kouchner de 2002 relative aux « droits des malades », a été une avancée importante pour les victimes d’infections nosocomiales et d’accidents médicaux hors affection iatrogène.
  • Cependant, il n’est pas adapté aux victimes d’effets indésirables graves de médicaments (alias aléas thérapeutiques) qui ont notamment les plus grandes difficultés à :
    • démontrer l’imputabilité du médicament dans la survenue d’un effet indésirable, avec de très grandes variations d’interprétation entre les Commissions de conciliation et d’indemnisation (CCI) et selon les rapports d’expertise établis;
    • démontrer l’atteinte du seuil de gravité élevé requis pour être indemnisé.
    • De plus, la date d’administration du traitement en cause, qui doit être postérieure au 4 septembre 2001, exclut arbitrairement de nombreuses victimes.
  • Une meilleure reconnaissance des victimes de médicaments contribuerait pourtant à davantage responsabiliser l’ensemble des acteurs de santé (notamment les firmes pharmaceutiques, les soignants, et les autorités sanitaires), et par conséquent à une amélioration de la qualité des soins.
  • Après avoir présenté l’état des lieux de la situation des victimes d’effets indésirables graves de médicaments, cette note de synthèse s’intéresse aux moyens d’améliorer la situation des victimes.
  • Nos recommandations concrètes s’organisent en 2 objectifs :
    • améliorer la reconnaissance et l’indemnisation des victimes ;
    • prévenir la survenue d’effets indésirables médicamenteux.
  • En France, dans le cadre de la loi de santé publique en discussion en 2015, la modification de quelques dispositions du Code de la santé publique permettrait de prolonger et compléter les avancées accomplies en matière d’indemnisation des usagers du système de santé par la loi du 4 mars 2002 :
    • les actions de groupe en santé rendraient la voie contentieuse plus accessible aux victimes ;
    • tandis que la création d’un fonds d’indemnisation « produit de santé » spécifique, notamment financé par les firmes pharmaceutiques et dont la gestion serait confiée à l’ONIAM, permettrait aux victimes d’effets indésirables graves de médicaments d’être indemnisées de leurs préjudices en l’absence de responsabilité du producteur. Cette option a déjà été retenue dans plusieurs pays, dont le Japon et Taïwan, et est compatible avec la réglementation européenne (pas de modification de fond du droit de la responsabilité).

Télécharger le rapport 20150222_rapport_indemnisation_victime1.0_COMPLET_FINAL

Loi de santé publique française – Actions de groupe : nécessaires, mais pas suffisantes

AMALYSTE est co-signataire du communiqué de presse signé par le CLAIM, le Collectif Europe et Médicament, La FNATH, d’autres associations de victimes (distilbène) et Irène Frachon.

Il y a un an, au moment des discussions autour du projet de loi sur la consommation en France, nous appelions à « élargir et adapter la procédure d’action de groupe au secteur de la santé ».

Nous demandions aussi, dans le cadre de la loi de santé publique alors annoncée pour 2014, des mesures devant enfin permettre une réparation équitable des dommages liés aux produits de santé.

ACTIONS DE GROUPE : EFFICACES A CONDITION DE S’EN DONNER LES MOYENS. Le 19 juin 2014, lors de sa présentation des orientations du projet de loi santé, Madame Touraine, Ministre des affaires sociales et de la santé, a annoncé que « face aux dommages sériels en santé, un droit nouveau pourrait être envisagé : l’instauration d’une action de groupe ». Nous encourageons la Ministre à faire de cette proposition au conditionnel une réalité en France. De nombreux autres pays ont déjà franchi le pas .

Les actions de groupe permettent à des victimes caractérisées par une grande similarité des situations de se regrouper. Ce regroupement favorise la constitution de dossiers bien documentés (partage des éléments de preuve rassemblés), donc la procédure judiciaire.

L’expérience des autres pays montre cependant que certaines conditions sont nécessaires pour garantir l’efficacité des actions de groupe, par exemple : l’accès aux actions de groupe doit être le plus large possible ; dans certains cas, les dommages et intérêts doivent pouvoir être punitifs afin de remplir une fonction dissuasive.

POUR UNE REPARATION EQUITABLE DES DOMMAGES LIES AUX PRODUITS DE SANTE. Se limiter aux actions de groupe ne suffira pas réellement à améliorer la situation des victimes d’effets indésirables médicamenteux. Une évolution du droit européen et du droit français est nécessaire pour rétablir des régimes de responsabilité plus pertinents. En effet, depuis l’application d’une directive européenne de 1985 relative aux produits défectueux (transposée en France en 1998), les firmes pharmaceutiques n’ont plus d’obligation de sécurité de résultat vis-à-vis des patients, disposant dès lors d’une quasi-immunité.

En France, la loi relative aux droits de malades de 2002 (loi Kouchner) prévoyait que, dans certains cas, la solidarité nationale puisse indemniser les victimes d’effets indésirables quand les fabricants ne pouvaient pas voir leur responsabilité engagée. Cependant, en pratique, une minorité de victimes sont indemnisées par la solidarité nationale (Office national d’indemnisation des accidents médicaux, ONIAM). C’est en effet sur les victimes que repose la charge de la preuve, et elles ont des difficultés majeures à faire reconnaître l’imputabilité du médicament dans la survenue du dommage face aux experts. De plus, leurs séquelles sont souvent sous-estimées, ne leur permettant pas d’atteindre le seuil de gravité très élevé requis pour être indemnisées.

ÉCOUTER LES VICTIMES. Conjointement avec d’autres organisations et des associations de victimes, le Collectif Europe et Médicament publiera prochainement un état des lieux détaillé de la situation, permettant de prendre la mesure des difficultés des victimes.

Nous présenterons aussi nos recommandations concrètes d’amélioration, notamment :

  • rétablir, au niveau européen, le régime de la responsabilité des firmes avec obligation de sécurité de résultat vis-à-vis des patients. La France peut être l’État membre moteur de cette évolution qui bénéficiera aux patients de l’ensemble de l’Union européenne ;
  • rendre publiquement accessibles l’ensemble des éléments permettant à la victime d’étayer l’imputabilité médicamenteuse. Au-delà des données administratives de l’assurance maladie (open data), il s’agit aussi et surtout de permettre l’accès public : aux résultats détaillés des essais cliniques, comme le prévoyait l’Agence européenne du médicament (EMA) avant de faire marche arrière sous la pression de la Commission européenne et des accords commerciaux de libre échange transatlantiques ; et à la base française de pharmacovigilance (observations détaillées mais sous forme anonymisée) ;
  • améliorer le fonctionnement de l’ONIAM, le mécanisme français d’indemnisation en cas d’aléas thérapeutiques ou de procédure par la voie amiable : réduction du seuil de gravité afin d’exclure moins de victimes aux séquelles graves mais sous-estimées ; création d’un régime spécial de responsabilité pour les médicaments figurant sur la liste des médicaments sous surveillance supplémentaire ; etc.

TELECHARGER LE COMMUNIQUE COMPLET ICI

Indemnisation des victimes de médicaments : un parcours semé d’embûches

AMALYSTE et plusieurs associations de patients ont témoigné auprès des journalistes de QUE CHOISIR sur les difficultés que rencontrent les victimes pour être indemnisées. La revue a publié dans son numéro de mars 2013 un article assez complet et didactique sur le sujet.

En fait de parcours semé d’embûches, l’indemnisation des personnes victimes d’accidents provoqués par des médicaments serait un véritable chemin de croix, selon la revue QUE CHOISIR qui publie en mars une enquête sur le sujet. « La première difficulté, c’est la preuve », indique Jean-Paul Geai, rédacteur en chef de la revue de consommation, interrogé par France-Info. C’est à la victime d’apporter la preuve que c’est bien le médicament qui est à l’origine de l’accident.

Il va lui falloir passer par une expertise médicale, dont les frais seront à sa charge si elle entend engager une procédure devant une juridiction civile. Les frais peuvent être très élevés et apporter la preuve n’est pas facile. Il faut avoir gardé ses vieilles ordonnances prouvant la prise de médicaments, apporter le témoignage de son médecin traitant. Certains rechignent, par crainte d’être accusés de complicité ».

Autre difficulté : « Si la notice mentionne les effets indésirables du médicament, la responsabilité du laboratoire est automatiquement dégagée. Une liste des effets indésirables suffit, sans forcément mentionner le degré du risque. La notice est un véritable «  parapluie  » pour le laboratoire, d’où des notices très longues qui protègent finalement plus le laboratoire et pas tellement le patient ».

Pour écouter, l’intégralité de l’interview de Jean-Paul Geai, c’est par ici :

Pour les abonnés de Que Choisir, l’article est consultable ICI.

La position d’AMALYSTE sur la gestion du risque reprise dans Prescrire

La position d’AMALYSTE sur la gestion du risque d’accidents médicamenteux graves, publiée dans le cadre du scandale sanitaire du Médiator et diffusée notamment lors des Assises du Médicament à été reprise dans la revue Prescrire Nº 343 d’avril 2012.

Dans son édito (pdf), la revue salue notre action de réflexion sur la gestion du risque médicamenteux : « Le combat et l’engagement empreints de dignité de l’association Amalyste interpellent aussi les soignants que nous sommes. Ces syndromes ne sont plus seulement deux effets indésirables rares et graves, ils sont la réalité de tous ces patients. S’arrêter, réfléchir, prendre de nouveau du recul. C’est ce que ces patients et cette association nous incitent à faire. […] Amalyste, une association de patients, deux syndromes sur une notice, mais surtout des patients en chair et en os dont l’action, visant à ce que la société s’interroge sur le risque médicamenteux, est exemplaire et force le respect. »

La position d’AMALYSTE a également été reprise par la version internationale de Prescrire.